Cosmogonie biblique et Table d’Émeraude par Christian Barbarit

 

 

 

Genèse – verset 7 – ‘Et Dieu fit l’étendue, et il sépara les eaux qui sont au-dessous de l’étendue d’avec les eaux qui sont au-dessus de l’étendue. Et cela fut ainsi.’

Verset 8 – ‘Dieu appela l’étendue ciel.’

 

Ce texte sur la création du monde est sans doute le plus mystérieux de l’Ancien Testament. Après que Dieu ait créé la Terre qui séparait les eaux du dessous, c’est-à-dire les océans, il créa le Ciel. Jusqu’ici, l’image est intelligible par notre esprit de simple mortel. Mais que peuvent bien être les ‘eaux qui sont au-dessus de l’étendue’ ? Il y aurait donc des eaux qui seraient situées au-dessus du ciel ? Cela dépasse nos codes de compréhension.

 

Pour tenter d’interpréter cette allégorie, nous pouvons nous risquer à chercher d’autres sources que la Bible, qui nous donneraient des clefs de déchiffrage, en quelque sorte. On peut trouver une concordance troublante dans un texte qui remonte à la nuit des temps, dont la source est sans doute dans la philosophie de l’Ecole des Mystères de l’ancienne Egypte, berceau de l’Hermétisme. On parle là de sources qui nous ramènent au 17ème Siècle avant JC. La Table d’Emeraude est un texte court qui est attribué à Hermès Trismégiste, fondateur présumé de la philosophie hermétique. Mais les anciens égyptiens considéraient que Trismégiste était l’incarnation du Dieu Thôt, le Dieu à la tête d’Ibis, inventeur de l’écriture et du langage. Au-delà de la mythologie, la Table d’Emeraude est bien un texte écrit dans des temps impossibles à identifier formellement et dont les phrases mystérieuses ont toujours alimenté les études des théologiens et philosophes au cours des Siècles, quelles que soient leur religion, du reste.

 

La phrase la plus mystérieuse de ce texte est la suivante :

 

Tout ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et tout ce qui est en haut est comme ce qui est en bas.’

 

Comparons cette phrase avec celle de la Genèse :

 

Et Dieu fit l’étendue, et il sépara les eaux qui sont au-dessous de l’étendue d’avec les eaux qui sont au-dessus de l’étendue.’

 

On ne peut ignorer l’analogie entre ces deux mystères, alors que la Bible est un texte très jeune par rapport aux sources antiques de la Table d’Emeraude et ensuite de la Kabbale juive, dont l’Ancien Testament s’inspire également largement.

L’interprétation qui est donnée le plus communément par les théologiens à cette phrase de la Table d’Emeraude est la projection de l’Astral, ou Macrocosme vers le monde connu qui est le Microcosme, en une image identique à petite échelle. C’est du reste le sens même du sceau de Salomon, ici représenté, et qui est le symbole de cette union entre le Macrocosme et le Microcosme qui se retrouvent imbriqués dans l’étoile à six branches. L’analogie peut alors apparaître clairement dans la Genèse où les eaux du dessus représenteraient le Macrocosme et les eaux du dessous le Microcosme.

 

Si la cosmogonie chrétienne a retenu l’allégorie de la création du monde en sept jours, sous forme d’un chantier planifié par Dieu, la cosmogonie égyptienne est beaucoup moins naïve et d’une portée philosophique plus élaborée car elle s’adressait à une élite intellectuelle : les prêtres et les pharaons (art sacerdotal et art royal). Selon les anciens égyptiens, au début était le ‘Noun’ ou chaos originel, d’où a été créé l’ordre, par séparation des éléments primordiaux, l’eau et le feu. Il s’agissait d’un magma informe ou océan primordial. Au cœur de cette nuit éternelle, Atoum, l’esprit divin, s’éveilla. La pensée issue du cœur d’Atoum produira le verbe et le verbe est l’origine de la création de l’Univers. Le Monde connu sera alors la projection identique du monde astral : ‘ce qui est en bas est comme ce qui est en haut.’

 

L’illustration très concrète de ce grand principe hermétique a été appliquée au pied de la lettre dans la construction des Pyramides. Les Pyramides de Gizeh sont la projection géométrique exacte de la Constellation d’Orion, comme on peut le constater sur le schéma ci-dessus avec un parfait respect des proportions. 

 

En allant encore plus loin dans ces analogies, l’ingénieur civil Robert Bauval a restitué en 1994 la carte du ciel tel qu’il était à l’époque de Khéops. Il a ainsi pu établir que le conduit sud de la chambre du roi, de pente 45°, pointe sur le Baudrier, au moment où Orion est au plus haut sur le méridien, tandis que le conduit nord pointe lui vers l'étoile polaire de l'époque (α Draconis), et le conduit sud de la chambre de la reine (39° environ) pointe sur l'étoile Sirius (α Canis Majoris). Mais beaucoup plus mystérieux et inexplicable de façon rationnelle, il montre que le Nil est le reflet de la Voie Lactée, comme si les bâtisseurs avaient voulu représenter au sol une sorte de carte du ciel. Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut.’ Les mystères de la Table d’Emeraude continueront longtemps de nous faire réfléchir à la profondeur mystique de l’ancienne Egypte et à sa corrélation, si on veut bien l’interpréter ainsi, avec l’Ancien Testament.